Paul Karl Feyerabend
Feyerabend (1924-1994), philosophe autrichien, l’un des représentants du rationalisme critique. Son œuvre intéresse principalement la philosophie des sciences et l’épistémologie.
Né à Vienne, il étudie l’art dramatique à Weimar, ainsi que l’histoire, la physique et l’astronomie. Dans le même temps, il suit les cours de Victor Kraft, qui a été membre du cercle de Vienne, et est reçu docteur en philosophie en 1951. À partir de 1959, il enseigne la philosophie à l’université de Berkeley, puis à l’école supérieure d’enseignement technique de Zurich.
Dans Contre la méthode (Against Method, 1975), Feyerabend esquisse « une théorie anarchiste de la connaissance » : il cherche à démontrer que le progrès scientifique n’est pas le fruit de préceptes méthodiques stricts mais plutôt d’une démarche consistant à s’écarter des idées reçues et des théories (ou des erreurs) dominantes. En énonçant que la méthodologie scientifique tient « tout pour possible », Feyerabend prend clairement position contre les partisans de la scientificité, parmi lesquels Rudolf Carnap et Karl Popper, dont il a suivi l’enseignement dans les années cinquante. Sa critique de l’empirisme anglo-saxon contemporain est construite sur la mise en question de la théorie proposée par Ernest Nagel, selon laquelle il serait possible d’expliquer le développement scientifique par réduction : reprenant Thomas Kuhn, il s’attache à montrer qu’une « incommensurabilité » sépare deux théories scientifiques, ne serait-ce que parce que, de l’une à l’autre, les mots descriptifs peuvent être complètement différents. Feyerabend va jusqu’à considérer que toutes les théories sont fausses, puisque les unes et les autres cherchent sans cesse à contester leur validité réciproque.
Prônant une sorte d’« anarchisme méthodologique », Feyerabend, dans Science in Free Society (« la Science pour des hommes libres », 1978), plaide en faveur d’une science démocratisée qui, affranchie de tout contrôle étatique, doit œuvrer au vu et au su de tous les citoyens.