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Paul Nizan

Paul Nizan

1 PRÉSENTATION

Nizan (1905-1940), philosophe, essayiste, journaliste et romancier français, l’une des figures marquantes de la littérature engagée de l’entre-deux-guerres.

2 LE PAMPHLÉTAIRE MILITANT

Né à Tours, fils d’ingénieur, Paul Nizan fait de brillantes études au lycée Henri IV, à Paris, où il se lie d’amitié avec Jean-Paul Sartre, puis il entre à l’École normale supérieure. De tempérament dépressif, il interrompt sa scolarité et part pour Aden, sur la mer Rouge, où il devient précepteur. L’organisation de la vie coloniale qu’il découvre sur place explique en partie son adhésion au Parti communiste en 1927, à son retour en France. Il reprend ses études et obtient en 1929 l’agrégation de philosophie, en même temps que Sartre et Simone de Beauvoir. Il enseigne quelque temps au lycée de Bourg-en-Bresse, puis décide de se consacrer entièrement à la littérature et publie ses premiers pamphlets : Aden Arabie (1931), violent réquisitoire contre la bourgeoisie, et les Chiens de garde (1932), dans lequel il s’attaque à l’idéalisme universitaire et à la « philosophie de chambre ».
En 1932, celui que la presse surnomme « le messie rouge » s’engage dans la vie politique et se présente aux élections législatives dans l’Ain. Cette unique tentative est un échec.

3 LE ROMANCIER ENGAGÉ

En 1933 paraît Antoine Bloyé, dans lequel Paul Nizan met en scène les dérives d’un ouvrier qui s’est embourgeoisé. Ce premier roman est probablement inspiré par la vie ratée de son père, qui avait selon lui trahi sa classe sociale. Toujours très critique vis-à-vis de la bourgeoisie, il espère que « les hommes n’oublieront pas éternellement leur indigence, leur douleur et leur humiliation. Ils ne seront pas indéfiniment dupés par les grands appareils d’illusion, les décors artificiels à l’abri desquels la bourgeoisie maintient son impitoyable pouvoir. »
En 1934, il effectue un long voyage en URSS et participe au Premier Congrès des écrivains soviétiques qui se tient à Moscou. Il y accueille d’autres hommes de lettres français proches des idées du Parti communiste, notamment André Malraux, Louis Aragon et Jean-Richard Bloch (1884-1947).
De retour en France, il publie son deuxième roman, le Cheval de Troie (1935), récit d’une grève dans une ville de province, puis devient collaborateur à l’Humanité, où il est chargé de la rubrique de politique étrangère. En 1936, il publie un essai sur les Matérialistes de l’Antiquité et, l’année suivante, il entre au quotidien communiste Ce Soir. Il obtient le prix Interallié avec la Conspiration (1938), son troisième roman, qui rapporte l’histoire de jeunes bourgeois entichés de révolution, qui conspirent contre leur classe sociale.
En septembre 1939, au lendemain du pacte germano-soviétique, il quitte le Parti communiste. Ce geste de protestation lui vaut l’hostilité de plusieurs écrivains. Peu après, il publie ses Chroniques de septembre, essai historique portant sur les accords de Munich. Mobilisé pendant la guerre, il meurt lors de la bataille de Dunkerque, le 23 mai 1940.

4 L’« AFFAIRE NIZAN »

À la Libération, les livres de Paul Nizan sont retirés du comptoir des Écrivains combattants. Le Parti communiste, y compris Louis Aragon, condamne publiquement Nizan et son œuvre. Il faut attendre 1960 et la réédition de Aden Arabie, précédé d’une préface remarquable de Jean-Paul Sartre, pour le voir faire une seconde entrée dans le monde littéraire, qui lui vaut cette fois bien plus qu’un simple succès d’estime.
Son œuvre constitue l’un des rares exemples français de romans politiques de qualité. Acerbe, lucide, passionné et pessimiste, Paul Nizan a toujours refusé l’idée qu’une utopie puisse justifier la mort d’un homme, au point de remettre en question la volonté de « changer le monde » proclamée par certains de ses personnages.

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